L’enregistrement d’une marque est une étape cruciale dans la stratégie de protection et de valorisation des actifs immatériels d’une entreprise. Cependant, ce processus n’est pas dénué d’embûches et requiert une attention particulière pour éviter des erreurs coûteuses qui pourraient compromettre la sécurité juridique de la marque. Dans cet article, nous allons aborder les principaux pièges à éviter lors de l’enregistrement d’une marque.
Un choix de marque trop descriptif ou générique
Le premier écueil concerne le choix du signe à enregistrer en tant que marque. Une erreur commune est de choisir un terme trop générique ou descriptif, qui ne peut pas être approprié exclusivement par une entreprise car il doit rester disponible pour tous. Par exemple, enregistrer le terme ‘Chocolat’ pour désigner une marque de confiseries au chocolat serait irrecevable car il décrit directement les produits vendus. Il est donc essentiel d’opter pour un signe distinctif qui se démarque et qui peut être légalement protégé. Un bon exemple serait ‘Kinder’ pour Ferrero: un terme emprunté à l’allemand mais utilisé dans un contexte original qui ne décrit pas directement le produit.
Ne pas vérifier l’antériorité de la marque
Un autre piège est de négliger la recherche d’antériorité avant le dépôt de la demande d’enregistrement. Cette étape permet de s’assurer qu’une marque similaire ou identique n’a pas déjà été enregistrée pour des produits ou services comparables, ce qui pourrait entraîner un refus du dépôt ou pire, une action en contrefaçon par le titulaire de la marque antérieure. Prenons l’exemple du litige entre Apple Corps, société gérant les intérêts des Beatles, et Apple Inc., le géant informatique; bien que leurs domaines d’activités initiaux étaient différents, l’évolution des activités d’Apple Inc. dans le domaine musical a conduit à un conflit sur les droits liés au nom ‘Apple’. Ces situations peuvent souvent être évitées grâce à une recherche minutieuse préalable.
Il est également essentiel que les entreprises prennent en compte les marques non seulement dans leur propre pays mais aussi dans les territoires où elles envisagent d’étendre leurs activités. Les systèmes internationaux tels que le Protocole de Madrid offrent la possibilité d’enregistrer sa marque dans plusieurs juridictions via une seule demande, simplifiant ainsi le processus tout en exigeant une vigilance accrue quant aux droits existants dans chaque pays concerné.
Outre ces aspects légaux, il faut aussi considérer la dimension stratégique du dépôt de la marque. Certaines entreprises font l’erreur de ne déposer leur marque que dans une classe spécifique selon la classification internationale des produits et services (la Classification de Nice), alors qu’il serait plus judicieux d’inclure également les classes correspondant aux extensions futures prévues pour les produits ou services. L’exemple classique ici est celui de Google qui, initialement associé aux services internet et moteurs de recherche (Classe 42), a depuis largement diversifié ses activités nécessitant ainsi une protection dans diverses autres classes.
Ignorer les spécificités culturelles et linguistiques
Lorsque les entreprises visent une présence internationale, elles doivent prendre garde aux connotations culturelles et linguistiques liées à leur marque dans différents pays. Un nom qui sonne bien et porte un message positif dans une langue peut avoir un sens inapproprié ou même offensant dans une autre culture. Un cas célèbre est celui du modèle automobile ‘Nova’ de Chevrolet, dont le nom a été interprété comme ‘ne marche pas’ (‘no va’) en espagnol, ce qui n’est évidemment pas idéal pour vendre des voitures! Ce genre d’accident peut être évité par des recherches ciblées sur la perception du nom envisagé dans différentes langues et cultures avant son dépôt.
Pour finir, il convient aussi d’évoquer l’importance du suivi post-enregistrement de la marque. Beaucoup pensent à tort que l’enregistrement suffit à lui seul pour garantir les droits sur la durée; or il faut régulièrement utiliser la marque telle qu’elle a été enregistrée sous peine qu’elle soit annulée pour défaut d’usage sérieux au bout d’un certain temps sans parler des renouvellements périodiques nécessaires pour maintenir sa protection juridique.
Cet article a offert un aperçu non exhaustif mais essentiel des écueils à éviter lorsqu’on souhaite sécuriser juridiquement sa propriété intellectuelle par le biais du dépôt et de l’enregistrement d’une marque. En somme, derrière chaque choix stratégique se cache un ensemble complexe d’exigences légales qu’il convient de maîtriser afin que votre signe distinctif puisse réellement bénéficier du monopole d’exploitation promis par son statut officiellement reconnu.